Porphyre, Commentateur de la Physique d'Aristote, 1985
By: Moraux, Paul, Motte, André (Ed.), Rutten, Christian (Ed.)
Title Porphyre, Commentateur de la Physique d'Aristote
Type Book Section
Language French
Date 1985
Published in Aristotelica: Mélanges offerts à Marcel de Corte
Pages 227-239
Categories no categories
Author(s) Moraux, Paul
Editor(s) Motte, André , Rutten, Christian
Translator(s)
Comme nous l’avons vu, il ne semble pas que Simplicius ait utilisé systématiquement la synopsis des livres V à VIII. Celle-ci a-t-elle laissé des traces ailleurs dans la littérature tardive ? Nous n’en avons aucune preuve formelle. Je voudrais pourtant attirer l’attention sur un passage du commentaire de Macrobe au Somnium Scipionis de Cicéron. Il s’agit d’une discussion de la thèse platonicienne selon laquelle l’âme est immortelle parce qu’elle est automotrice. Macrobe note qu’Aristote a contesté la légitimité de cette thèse et affirmé que l’âme ne peut se mouvoir elle-même et ne peut même subir aucun mouvement. Aristote montrait d’abord qu’il y a, dans la nature, quelque chose d’immobile. Ensuite, il cherchait à prouver que tout ce qui est mû l’est par quelque chose d’autre. Puis il établissait l’existence d’un premier moteur non mû. Contre Platon, il montrait alors que tout principe de mouvement est immobile, et que donc, si l’âme est principe de mouvement, elle doit être immobile. Pour illustrer ces diverses thèses d’Aristote, Macrobe reproduit, sous une forme assez squelettique, des arguments présentés par Aristote au livre VIII de la Physique. Il ne s’agit pas là de citations ou d’extraits littéraux, mais bien de résumés où la substance des développements d’Aristote est réduite à l’essentiel, donc d’une sorte d’epidromê ou de synopsis des passages utilisés. Or, nous savons que de tous les néoplatoniciens, Porphyre est l’un de ceux que Macrobe, qui dépend d’ordinaire de sources plus anciennes, utilise le plus volontiers et le plus fréquemment. Dans son ensemble, la critique moderne admet comme très probable l’hypothèse selon laquelle Macrobe aurait emprunté au traité de Porphyre Peri Psychês pros Boêthon les développements qu’il consacre au passage du Phèdre, traduit par Cicéron, sur l’automotricité et l’immortalité de l’âme. La question se pose donc de savoir si les objections d’Aristote ont été tirées de la même source, ou si Macrobe les a trouvées ailleurs, chez un péripatéticien, par exemple. Si l’on tient compte du fait que Porphyre connaissait très bien Aristote, dont il avait en partie commenté et en partie résumé la Physique, on pourra, ce me semble, fort bien imaginer que, dans son ouvrage sur l’âme, il s’était attaché non seulement à présenter les vues de Platon, mais aussi à les défendre contre les objections auxquelles elles pouvaient se heurter. Il est donc tout naturel que Porphyre se soit assez longuement étendu sur les difficultés que les théories aristotéliciennes du mouvement et du premier moteur suscitaient contre les arguments de Platon sur l’automotricité de l’âme. À cet effet, Porphyre avait exploité surtout le dernier livre de la Physique. Et comme il avait résumé sous la forme d’une synopsis les livres V à VIII, tout nous invite à croire qu’il avait largement utilisé cette synopsis en rédigeant son propre Peri Psychês. Mais pour le dire en toute franchise, cette hypothèse, tout alléchante qu’elle est, ne dépasse pas la vraisemblance. Nous ne disposons pas de fragments certains du résumé porphyrien du huitième livre de la Physique et, dès lors, nous ne sommes pas en mesure de prouver, par voie de comparaison, que les objections d’Aristote présentées par Macrobe remontent bien, en dernière analyse, à la synopsis qui a fait l’objet de la présente étude. [conclusion p. 237-239]

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Il est donc tout naturel que Porphyre se soit assez longuement \u00e9tendu sur les difficult\u00e9s que les th\u00e9ories aristot\u00e9liciennes du mouvement et du premier moteur suscitaient contre les arguments de Platon sur l\u2019automotricit\u00e9 de l\u2019\u00e2me.\r\n\r\n\u00c0 cet effet, Porphyre avait exploit\u00e9 surtout le dernier livre de la Physique. Et comme il avait r\u00e9sum\u00e9 sous la forme d\u2019une synopsis les livres V \u00e0 VIII, tout nous invite \u00e0 croire qu\u2019il avait largement utilis\u00e9 cette synopsis en r\u00e9digeant son propre Peri Psych\u00eas. Mais pour le dire en toute franchise, cette hypoth\u00e8se, tout all\u00e9chante qu\u2019elle est, ne d\u00e9passe pas la vraisemblance. 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Aristotelica: Mélanges offerts à Marcel de Corte, 1985
By: Motte, André (Ed.), Rutten, Christian (Ed.)
Title Aristotelica: Mélanges offerts à Marcel de Corte
Type Edited Book
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Date 1985
Publication Place Bruxelles – Liège
Publisher Éditions Ousia – Presses universitaires
Series Cahiers de philosophie ancienne
Volume 3
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Editor(s) Motte, André , Rutten, Christian
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Porphyre, Commentateur de la Physique d'Aristote, 1985
By: Moraux, Paul, Motte, André (Ed.), Rutten, Christian (Ed.)
Title Porphyre, Commentateur de la Physique d'Aristote
Type Book Section
Language French
Date 1985
Published in Aristotelica: Mélanges offerts à Marcel de Corte
Pages 227-239
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Author(s) Moraux, Paul
Editor(s) Motte, André , Rutten, Christian
Translator(s)
Comme nous l’avons vu, il ne semble pas que Simplicius ait utilisé systématiquement la synopsis des livres V à VIII. Celle-ci a-t-elle laissé des traces ailleurs dans la littérature tardive ? Nous n’en avons aucune preuve formelle. Je voudrais pourtant attirer l’attention sur un passage du commentaire de Macrobe au Somnium Scipionis de Cicéron. Il s’agit d’une discussion de la thèse platonicienne selon laquelle l’âme est immortelle parce qu’elle est automotrice.

Macrobe note qu’Aristote a contesté la légitimité de cette thèse et affirmé que l’âme ne peut se mouvoir elle-même et ne peut même subir aucun mouvement. Aristote montrait d’abord qu’il y a, dans la nature, quelque chose d’immobile. Ensuite, il cherchait à prouver que tout ce qui est mû l’est par quelque chose d’autre. Puis il établissait l’existence d’un premier moteur non mû. Contre Platon, il montrait alors que tout principe de mouvement est immobile, et que donc, si l’âme est principe de mouvement, elle doit être immobile.

Pour illustrer ces diverses thèses d’Aristote, Macrobe reproduit, sous une forme assez squelettique, des arguments présentés par Aristote au livre VIII de la Physique. Il ne s’agit pas là de citations ou d’extraits littéraux, mais bien de résumés où la substance des développements d’Aristote est réduite à l’essentiel, donc d’une sorte d’epidromê ou de synopsis des passages utilisés. Or, nous savons que de tous les néoplatoniciens, Porphyre est l’un de ceux que Macrobe, qui dépend d’ordinaire de sources plus anciennes, utilise le plus volontiers et le plus fréquemment.

Dans son ensemble, la critique moderne admet comme très probable l’hypothèse selon laquelle Macrobe aurait emprunté au traité de Porphyre Peri Psychês pros Boêthon les développements qu’il consacre au passage du Phèdre, traduit par Cicéron, sur l’automotricité et l’immortalité de l’âme. La question se pose donc de savoir si les objections d’Aristote ont été tirées de la même source, ou si Macrobe les a trouvées ailleurs, chez un péripatéticien, par exemple.

Si l’on tient compte du fait que Porphyre connaissait très bien Aristote, dont il avait en partie commenté et en partie résumé la Physique, on pourra, ce me semble, fort bien imaginer que, dans son ouvrage sur l’âme, il s’était attaché non seulement à présenter les vues de Platon, mais aussi à les défendre contre les objections auxquelles elles pouvaient se heurter. Il est donc tout naturel que Porphyre se soit assez longuement étendu sur les difficultés que les théories aristotéliciennes du mouvement et du premier moteur suscitaient contre les arguments de Platon sur l’automotricité de l’âme.

À cet effet, Porphyre avait exploité surtout le dernier livre de la Physique. Et comme il avait résumé sous la forme d’une synopsis les livres V à VIII, tout nous invite à croire qu’il avait largement utilisé cette synopsis en rédigeant son propre Peri Psychês. Mais pour le dire en toute franchise, cette hypothèse, tout alléchante qu’elle est, ne dépasse pas la vraisemblance. Nous ne disposons pas de fragments certains du résumé porphyrien du huitième livre de la Physique et, dès lors, nous ne sommes pas en mesure de prouver, par voie de comparaison, que les objections d’Aristote présentées par Macrobe remontent bien, en dernière analyse, à la synopsis qui a fait l’objet de la présente étude. [conclusion p. 237-239]

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Celle-ci a-t-elle laiss\u00e9 des traces ailleurs dans la litt\u00e9rature tardive ? Nous n\u2019en avons aucune preuve formelle. Je voudrais pourtant attirer l\u2019attention sur un passage du commentaire de Macrobe au Somnium Scipionis de Cic\u00e9ron. Il s\u2019agit d\u2019une discussion de la th\u00e8se platonicienne selon laquelle l\u2019\u00e2me est immortelle parce qu\u2019elle est automotrice.\r\n\r\nMacrobe note qu\u2019Aristote a contest\u00e9 la l\u00e9gitimit\u00e9 de cette th\u00e8se et affirm\u00e9 que l\u2019\u00e2me ne peut se mouvoir elle-m\u00eame et ne peut m\u00eame subir aucun mouvement. Aristote montrait d\u2019abord qu\u2019il y a, dans la nature, quelque chose d\u2019immobile. Ensuite, il cherchait \u00e0 prouver que tout ce qui est m\u00fb l\u2019est par quelque chose d\u2019autre. Puis il \u00e9tablissait l\u2019existence d\u2019un premier moteur non m\u00fb. Contre Platon, il montrait alors que tout principe de mouvement est immobile, et que donc, si l\u2019\u00e2me est principe de mouvement, elle doit \u00eatre immobile.\r\n\r\nPour illustrer ces diverses th\u00e8ses d\u2019Aristote, Macrobe reproduit, sous une forme assez squelettique, des arguments pr\u00e9sent\u00e9s par Aristote au livre VIII de la Physique. Il ne s\u2019agit pas l\u00e0 de citations ou d\u2019extraits litt\u00e9raux, mais bien de r\u00e9sum\u00e9s o\u00f9 la substance des d\u00e9veloppements d\u2019Aristote est r\u00e9duite \u00e0 l\u2019essentiel, donc d\u2019une sorte d\u2019epidrom\u00ea ou de synopsis des passages utilis\u00e9s. Or, nous savons que de tous les n\u00e9oplatoniciens, Porphyre est l\u2019un de ceux que Macrobe, qui d\u00e9pend d\u2019ordinaire de sources plus anciennes, utilise le plus volontiers et le plus fr\u00e9quemment.\r\n\r\nDans son ensemble, la critique moderne admet comme tr\u00e8s probable l\u2019hypoth\u00e8se selon laquelle Macrobe aurait emprunt\u00e9 au trait\u00e9 de Porphyre Peri Psych\u00eas pros Bo\u00eathon les d\u00e9veloppements qu\u2019il consacre au passage du Ph\u00e8dre, traduit par Cic\u00e9ron, sur l\u2019automotricit\u00e9 et l\u2019immortalit\u00e9 de l\u2019\u00e2me. La question se pose donc de savoir si les objections d\u2019Aristote ont \u00e9t\u00e9 tir\u00e9es de la m\u00eame source, ou si Macrobe les a trouv\u00e9es ailleurs, chez un p\u00e9ripat\u00e9ticien, par exemple.\r\n\r\nSi l\u2019on tient compte du fait que Porphyre connaissait tr\u00e8s bien Aristote, dont il avait en partie comment\u00e9 et en partie r\u00e9sum\u00e9 la Physique, on pourra, ce me semble, fort bien imaginer que, dans son ouvrage sur l\u2019\u00e2me, il s\u2019\u00e9tait attach\u00e9 non seulement \u00e0 pr\u00e9senter les vues de Platon, mais aussi \u00e0 les d\u00e9fendre contre les objections auxquelles elles pouvaient se heurter. Il est donc tout naturel que Porphyre se soit assez longuement \u00e9tendu sur les difficult\u00e9s que les th\u00e9ories aristot\u00e9liciennes du mouvement et du premier moteur suscitaient contre les arguments de Platon sur l\u2019automotricit\u00e9 de l\u2019\u00e2me.\r\n\r\n\u00c0 cet effet, Porphyre avait exploit\u00e9 surtout le dernier livre de la Physique. Et comme il avait r\u00e9sum\u00e9 sous la forme d\u2019une synopsis les livres V \u00e0 VIII, tout nous invite \u00e0 croire qu\u2019il avait largement utilis\u00e9 cette synopsis en r\u00e9digeant son propre Peri Psych\u00eas. Mais pour le dire en toute franchise, cette hypoth\u00e8se, tout all\u00e9chante qu\u2019elle est, ne d\u00e9passe pas la vraisemblance. Nous ne disposons pas de fragments certains du r\u00e9sum\u00e9 porphyrien du huiti\u00e8me livre de la Physique et, d\u00e8s lors, nous ne sommes pas en mesure de prouver, par voie de comparaison, que les objections d\u2019Aristote pr\u00e9sent\u00e9es par Macrobe remontent bien, en derni\u00e8re analyse, \u00e0 la synopsis qui a fait l\u2019objet de la pr\u00e9sente \u00e9tude. [conclusion p. 237-239]","btype":2,"date":"1985","language":"French","online_url":"","online_resources":"https:\/\/uni-koeln.sciebo.de\/s\/HITY0gikmySrLA8","doi_url":null,"categories":[],"authors":[{"id":137,"full_name":"Moraux, Paul ","role":{"id":1,"role_name":"author"}},{"id":468,"full_name":"Motte, Andr\u00e9","role":{"id":2,"role_name":"editor"}},{"id":469,"full_name":"Rutten, Christian","role":{"id":2,"role_name":"editor"}}],"book":null,"booksection":{"id":494,"section_of":297,"pages":"227-239","is_catalog":null,"book":{"id":297,"bilderberg_idno":null,"dare_idno":null,"catalog_idno":null,"entry_type":null,"type":4,"language":"no language selected","title":"Aristotelica: M\u00e9langes offerts \u00e0 Marcel de Corte","title_transcript":"","title_translation":"","short_title":"Motte1985","has_no_author":null,"volume":null,"date":"1985","edition_no":null,"free_date":"1985","abstract":"","republication_of":null,"online_url":"","online_resources":"https:\/\/uni-koeln.sciebo.de\/s\/vbTKdtbzJ5KxKIX","translation_of":null,"new_edition_of":null,"is_catalog":0,"in_bibliography":0,"is_inactive":0,"notes":null,"doi_url":null,"book":{"id":297,"pubplace":"Bruxelles \u2013 Lie\u0300ge","publisher":"E\u0301ditions Ousia \u2013 Presses universitaires","series":"Cahiers de philosophie ancienne","volume":"3","edition_no":"","valid_from":null,"valid_until":null}}},"article":null},"sort":["Porphyre, Commentateur de la Physique d'Aristote"]}

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